Le cahier de Maya, Isabel allende
Le cahier de Maya, Isabel Allende, Grasset, Mai 2013, 459 pages
Résumé :
Maya est une jeune femme de 19 ans. Née aux Etats-Unis, elle est élevée par sa grand-mère, un sacré personnage : dynamique, autoritaire, militante, un sacré bout de femme ; et son grand-père, son Popo qu’elle idolâtre carrément ! Maya est la narratrice, en réalité, c’est son journal que nous avons entre ses mains. Sa grand-mère, Nini a tenu à ce qu’elle écrive son histoire et elle nous prévient, elle va essayer de le faire de façon chronologique ce qui est difficile pour elle et sans exagérer ce qui semble relever de la gageure pour cette jeune femme entière, généreuse, excessive et aimante…Qu’on ne s’y trompe pas, il s’agit bel et bien d’un roman pour adultes malgré les apparences quoique cette lecture puisse s’avérer à bien des égards instructive pour les grands ados…
Le lecteur va osciller entre deux époques, la Maya du présent que sa grand-mère a déposée ni vue ni connue à l’aéroport afin qu’elle regagne anonymement la petite île de Chiloé, au large du Chili où un ami à sa Nini va l’accueillir ; et la Maya du passé, celle qui a traversé tant d’épreuves que le lecteur s’étonne au fil de la lecture qu’elle s’en soit sortie. Nous découvrons ainsi deux visages radicalement différents du même personnage, deux décors antinomiques et des rencontres humaines aux antipodes les unes des autres. Sur cette petite île de Chiloé où les autochtones semblent vivre à une autre époque, pauvres mais se nourrissant bien de leurs terres et solidaires les uns des autres, le temps ne s’écoule pas de la même façon, les distractions sont peu nombreuses en comparaison avec une vie urbaine mais Maya comprend très vite qu’elle n’a plus besoin de son Ipod pour s’emplir la tête de musique, elle a le chant des oiseaux. Elle découvre d’autres joies : celle d’apprivoiser le vieux Manuel qui fait presque figure de grand-père d’adoption, les contes populaires racontés par les îliens, l’entraide dans le village, les promenades en barque qui la font rencontrer des phoques…
Cette existence est apaisante et absolument idyllique au vu de ses tourments passés. En effet, après la disparition de son Popo et cet univers douillet d’astronomie et de chaleur humaine dans lequel elle avait sa place, Maya part en vrille et sa grand-mère en proie à son chagrin, ne voit rien venir. Maya sera placée dans une école pour la remettre sur le bon chemin… Hélas, elle va traverser une longue période de perdition et ce n’est qu’après avoir, a priori, touché le fond qu’un espoir de rédemption sera possible.
Critique :
Après une mise en place un peu lente, le roman devient de plus en plus passionnant et les personnages s’avèrent captivants. Les allers-retours entre passé proche et présent, par leur contraste saisissant, font l’originalité et l’intérêt de cette jolie et émouvante histoire. Par le portrait sans concession des différents protagonistes, Allende prête à Maya une plume vive pour son histoire pleine d’allant entre aventure, humour, et rebondissements de tout ordre… C’est aussi une jeune personne qui se construit et qui réfléchit sur la direction qu’elle souhaite donner à sa vie après avoir traversé un chemin chaotique semé d’embûches et avoir été témoin de révélations bien surprenantes. Le lecteur s’attache de plus en plus à ce personnage plaisant qui nous ouvre les portes de son univers. Et quel univers que le monde de Maya !
Un extrait de cet agréable roman :
« Voilà un mois que je vis dans cette île. Je ne sais si je finirai un jour par m’habituer au pas de tortue de Chiloé, à cette paresse, à cette menace permanente de pluie, à ce paysage immuable d’eau, de nuages et de vertes prairies. Tout est lisse, tout est quiétude. Les Chilotes ne connaissent pas la ponctualité, les projets dépendent du climat et de l’envie, les choses arrivent quand elles arrivent, à quoi bon faire aujourd’hui ce qu’on peut faire demain ? Manuel Arias se moque de mes listes et de mes programmes, inutiles dans cette culture atemporelle, ici une heure ou une semaine, c’est pareil ; pourtant il respecte ses horaires de travail et son livre avance au rythme qu’il s’est fixé.
Chiloé a sa propre voix. Avant je gardais les écouteurs collés à mes oreilles, la musique était mon oxygène, mais à présent je reste attentive pour comprendre l’espagnol alambiqué des Chilotes. Juanito Corrales a laissé mon ipod dans la poche de mon sac où il l’avait pris et nous n’avons jamais évoqué le sujet mais pendant la semaine qu’il a tardé à me le rendre, je me suis rendu compte qu’il ne me manquait pas autant que je le pensais. Sans mon ipod, je peux entendre la voix de l’île : les oiseaux, le vent, la pluie, le crépitement des bûches, les roues d’une charrette et, parfois, les violons lointains du Caleuche, un bateau fantôme qui navigue dans la brume et qu’on reconnaît à sa musique et aux sonnailles produites par les os des naufragés qui chantent et dansent à son bord. Le bateau est accompagné par un dauphin appelé cahuilla, le nom que Manuel a donné à son bateau. »
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