Erable, Saskia de Rothschild

Erable, Saskia de Rothschild, paru le 28 Janvier 2015 chez Stock (la Framboise), 280 pages.

Saskia de Rothschild est journaliste  à l’International New York Times et signe là son premier roman.

Mon résumé :

Jean-Charles Erable, héros éponyme, est un individu hors norme dont la vie routinière et banale ne laisse rien présager. Né dans de drôles de circonstances, il va garder de cette histoire de naissance exceptionnelle, une image redorée de lui-même. Surdoué, visionnaire mais encore calculateur, misanthrope, mythomane, il ne trouve pas réellement sa place. Ni au sein de sa famille dont il se détourne car ce sont des gens trop ordinaires à son goût, ni dans la société qu’il observe du haut de son piédestal imaginaire. Erable a alors une idée lumineuse pur tromper son ennui et interférer, mine de rien, dans la vie de ses semblables. Il crée une vaste supercherie : la société Fortuna distribuant des paniers de légumes directement chez les foyers ce qui n’est en réalité qu’une vitrine légale pour une entreprise secrète qui l’est beaucoup moins, elle, légale… Le but ultime de J-C Erable, c’est de s‘amuser à contrôler  la vie de ses concitoyens en orchestrant de vraies rencontres amoureuses. Les futurs couples pensent se rencontrer par hasard alors que notre anti-héros s’est infiltré dans leur réseau informatique et a tout manigancé. Cela l’amuse et le distrait.
Pour son projet fou et démesuré, Erable embauche un homme à ses côtés. Pas n’importe qui. Il a évidemment tout étudié de ce partenaire blessé par la vie n’ayant plus rien à perdre. Celui-ci ignore tous les tenants et aboutissants de ce projet fou. Il est bien entendu pour ces deux hommes qu’ils n’ont pas le droit d’organiser une rencontre pour eux-mêmes. Leur panel de sujets ou clients ne doit en aucun cas être utilisé à des fins personnelles.
Mais Erable n’est pas à un mensonge près et c’est peut-être lui au final qui se fera prendre à son propre piège…

Mon avis :

Qu’est-ce que le hasard ? Pourquoi rencontrons-nous telle personne et pas telle autre ? Cette question fascinante est ici habilement exploitée de manière fantaisiste et légère. Un brin de folie traverse ce premier roman parfaitement maîtrisé tant dans la progression narrative que dans l’écriture détaillée, journalistique, un rien impersonnelle à l’image du personnage principal. Les rebondissements se multiplient et la fin est excellente. Les personnages secondaires et leurs chemins de vie nuancent un tableau d’Erable quelque peu monocorde, un personnage que l’on adore détester.
Ce roman a figuré parmi les cinq finalistes du prix Landerneau Découvertes. Un très bon roman bourré de drôlerie et de surprises et une belle performance pour cette jeune auteure à suivre.

Un extrait qui vous met face à Erable, ce drôle de personnage :

   « Rien qu’en la regardant, Erable sut immédiatement comment la rendre heureuse. Trente-sept ans, la mine triste et un choix de collant qui laissait deviner qu’elle ne souhaitait plus séduire. Elle avait la tête penchée sur un livre d’Amélie Nothomb et mangeait un pain au chocolat dont les miettes se répandaient sur sa jupe. Sa tête dodelinait au rythme du bus. Cela devait faire environ quatre ans qu’elle était seule. Divorcée : il en aurait mis sa main à couper. Elle s’était acheté un chien l’année dernière et, au supermarché, elle lorgnait sur les packs familiaux de barbecue et sur les boîtes géantes de Chocapic.
Son hasard ? Ce serait au Monoprix ou peut-être à Intermarché. Il pourrait lui créer un destin devant un stand promotion. Il était sûr qu’elle adorait les stands promotions, ça devait lui rappeler son enfance.
Elle leva les yeux. C’était son arrêt. Elle sortit un marque-page de sa poche : une photo de chien, couché sur un canapé lie-de-vin. Il ne se trompait jamais. »

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