Chambre 2, Julie Bonnie

Chambre 2, Julie BonnieChambre 2, Julie Bonnie, Belfond, Août 2013, 185 pages

Ce roman a obtenu le prix Fnac 2013.

Résumé :

La narratrice évoque son quotidien : puéricultrice à l’hôpital, elle aborde le côté parfois sombre de la maternité. Et les difficultés inhérentes au milieu hospitalier. A chaque chambre, chaque patiente, une histoire de vie différente. Et dans la chambre 2 qui est parfois celle par laquelle Béatrice commence sa « tournée » : une femme présente depuis des lustres qui ne s’est jamais remis de son accouchement difficile où l’une de ses jumelles n’ pas survécu. De drames en surprises, petites joies et détresse humaine, Béatrice tisse les heures de sa journée en répondant présent et en offrant un sourire, quelques paroles apaisantes. Mais à la vérité, c’est une femme qui ne se sent pas à sa place, là, avec un vrai job, une blouse ordinaire et cet anonymat qui fait d’elle une personne invisible. Car son passé, comme on va le découvrir au fur et à mesure du roman, est tout autre. Joyeux, vivant, atypique, ce pan de sa vie est désormais révolu mais pour Béatrice, chaque journée à l’hôpital devient quasiment un supplice surtout quand elle compare sa vie actuelle à l’allégresse de son passé de danseuse nue sur les routes avec un groupe d’artistes dont son mari. Assurant des spectacles de musique accompagnés de danse, un vrai succès les a longtemps accompagnés et leur a permis de sillonner l’Europe. Cette époque combinait l’amour, le spectacle, la vie de bohème mais encore la vie de famille.
Car Béatrice est aussi une mère de deux enfants et elle évoque cette expérience incroyable de maternité : ses drôles d’accouchements, la vie dans le camion avec les bébés, cette fusion incroyable des corps. Aujourd’hui, ses enfants sont grands, ils sont adolescents et elle nourrit une grande nostalgie concernant ce temps de l’enfance qui s’est enfui et qui était, à ses yeux, synonyme d’une vraie liberté compte tenu de leurs choix de vie qui ne tenaient pas compte des réprobations générales. En effet, le corps médical et l’opinion bien-pensante ne voyaient  pas toujours d’un très bon oeil cette existence décousue, les enfants déscolarisés, le manque de stabilité au quotidien…
Ce n’est que tard dans le roman que le lecteur découvre ce qui a mis un frein à cette vie-là tellement belle et préférable, aux yeux de la narratrice, à celle qu’elle subit aujourd’hui.

Critique :

C’est un roman qui traite avant tout de la maternité mais sans naïveté ni langue de bois. L’auteure nous montre les différents aspects dont peuvent se draper la grossesse, l’accouchement, l’allaitement, le fait de devenir parent, la perte d’un enfant, les difficultés auxquelles sont confrontées des parents (inexpérimentés). Julie Bonnie fait la place belle au corps, à son immersion dans la société, à sa sensualité. L’écriture est vive et se fait parfois tranchante. Il peut se lire d’une traite car on décèle, en tant que lecteur, une vraie authenticité et une certaine urgence dans le ton qui donne soif de connaître le fin mot de l’histoire.
On ne se précipitera pas pour autant à l’offrir à sa meilleure copine enceinte surtout si cette dernière découvre justement les joies diverses de la maternité pour la première fois sous peine de l’inquiéter plus que de raison dans cette période de fragilité émotionnelle !…
Un premier roman plutot abouti avec un côté sombre très prégnant signé par une ancienne chanteuse qui a plus d’un point commun avec son héroïne…

Un extrait qui laisse à voir la philosophie endiablée de notre héroïne à la fois danseuse, mère et puéricultrice :

« MAIS J’AURAIS DÛ MOURIR.

   C’est comme ça qu’on se voyait, nous. It’s better to burn out than to fade away. L’avenir n’est pas censé exister, on n’est pas censés devenir vieux, ni même pas très vieux. La vie doit continuer comme ça, ou s’arrêter.
Danser nue. Danser nue. Danser nue Un rêve infini.
L’argent, on n’en parle pas. On a à l »époque toute une équipe technique qui s’occupe de ça. C’est vugaire. Nous, on danse. On nous paie pour ça. On se paie même le luxe de faire des enfants dans ces conditions.
Mourir jeune, au sommet de sa gloire, ne pas se voir vieillir, ne jamais vivre la grande descente aux enfers, les lettres de motivation, le CV avec marqué dessus
1990-2003, danseuse nue.
Le grand revers de l’underground.
Les amis qui ne vosu parlent plus, parce que vous êtes devenue trop chiante, aigrie, effrayante. La question pétrifiante : mais pourquoi ça ne marche plus ?
Et faire face aux sourires, mi-pitié mi-condescendance, de ceux à qui vous dites que vous ne regrettez ren. Sans parler des soirées arrosées à la vodka, qui vous trouvent pthétique, déclarant votre amour et votre jalousie en même temps à un artiste qui ne vous a rien demandé.
J’aurais figuré dans une anthologie du rock’n’roll, une photo de dos, la plus belle paire de fesses des années grunge. Je n’aurais jamais vu la chambre 2. Je n’aurais jamais été nue quand il faut une armure. J’aurais été à ma place, dans une tombe.
Mais je n’avais pas envie de mourir.
Et j’avais mes enfants.
Deux. Deux vivants en tout cas. » 

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