Le porteur d’histoire, Alexis Michalik
Le porteur d’Histoire, Alexis Michalik
C’est une pièce absolument enthousiasmante, truffée de références culturelles et historiques dans laquelle Alexis Michalik parvient à porter jusqu’au spectateur sa passion pour les livres qui se transmettent oralement et se matérialisent tels des trésors perdus et même enterrés !!!
Comment résumer cette pièce foisonnante qui emprunte une trame romanesque pleine de rebondissements ?
Qu’est-ce qu’une histoire ? s’interroge-t-on d’abord. Quelle légitimité accorder aux histoires racontées ? Questions difficiles autant que légitimes… Les histoires personnelles et individuelles forment-elles l’Histoire transmise par les manuels scolaires ? L’Histoire avec une majuscule n’est-elle pas la somme de toutes ces histoires d’anonymes et de gens célèbres comme Michalik nous le prouve par le biais de son personnage Martin Martin qui se mue en formidable conteur aux lèvres duquel nous serons durant toute la pièce suspendus. Cette interrogation sur la définition de l’Histoire qui ouvre la pièce se double d’une autre : la quête d’identité.
En effet, Martin Martin, le jeune (nous ferons connaissance de Martin Martin plus âgé un peu plus tard car la pièce ose le mélange des époques) au début de la pièce, arrive dans les Ardennes par une nuit d’orage, il se perd, demande son chemin, se dispute avec son épouse par téléphone parce qu’encore une fois semble-t-il, il est absent et elle ne peut compter sur lui mais il a toutefois une excuse sérieuse. Il s’agit de la mort de son père avec lequel il n’avait plus de contacts. Une figure paternelle que le notaire et les habitants de ce hameau vont faire découvrir au fils : un homme cultivé, passionné et entouré ce qui interpelle Martin Martin. Il n’est pas au bout de ses surprises car il va apprendre une histoire absolument fascinante sur son père où il est question de trésor livresque et de problèmes financiers qui le mèneront à une sorte de chasses aux trésors et de retour aux origines. Il a débusqué dans les affaires de son paternel un carnet manuscrit qui le conduira à s’aventurer sur les traces d’un passé auquel il avait cru fermer la porte.
Le feuilleton littéraire à la sauce XIXème peut bel et bien débuter. Voyage dans le temps et à travers les livres, la pièce de Michalik se décompose en moult épisodes qui sont comme autant de poupées russes venant d’imbriquer dans l’Histoire. On y croise une certaine Adélaïde pleine de mystère, grande héritière de la famille des Saxe de Bourville, qui va chercher à Paris un nouveau départ comme elle le confie à son compagnon de route, un très jeune homme qui va lui conter une histoire et cet homme c’est le futur grand écrivain Alexandre Dumas à qui la jeune Adélaïde s’avise de donner un sage conseil : selon elle, il devrait raconter des histoires comme il l’a fait avec elle. Le porteur d’histoire nous transporte encore en Algérie où un Martin Martin plus âgé raconte justement son histoire : celle où il est allé enterrer son père par cette nuit pluvieuse et est tombé sur une véritable bibliothèque, une mine d’or.
La mise en scène parfaitement étudiée permet au spectateur de différencier sans aucun problème les lieux et les époques sans confusion possible avec un intérêt croissant, un certain mystère entretenu tout au long de la pièce qui est comme un clin d’oeil à ces feuilletons littéraires du dix-neuvième siècle où des écrivains au lieu de publier leurs écrits sous forme de romans avaient alors choisi le mode du feuilleton qui apparaissaient chaque semaine dans les revues et créaient chez leurs lecteurs une attente fiévreuse. C’est cette même sensation qu’a su retranscrire avec brio le talentueux écrivain et metteur en scène Alexis Michalik qui a écrit une pièce sans fausse note, captivante de bout en bout.
Cette pièce est d’ores et déjà un véritable phénomène théâtral en s’adressant à un public large, habitué ou non à voir du théâtre, ne passez pas à côté si l’occasion vous en est donnée et accordez-vous une belle soirée de théâtre et venez voir Le Porteur d’Histoire à Paris!