Immortelles, Laure Adler
Immortelles, Laure Adler, Grasset, Août 2013, 362 pages
Laure Adler est journaliste, elle a publié auparavant plusieurs essais et récits mais elle signe avec Immortelles son premier roman très réussi.
Résumé :
Le prologue nous présente la narratrice qui parle au présent de ses amies qui ne sont plus auprès d’elle et pour cause : deux sont mortes et la troisième semble avoir disparu. Trois prénoms, trois femmes, trois destins mouvementés, trois véritables amies aux personnalités et aux parcours bien différents. Florence, Judith et Suzanne. En hommage à leur amitié qui a fait d’elles, aux yeux de la narratrice des « immortelles », la narratrice va convoquer tour à tour chacune d’entre elles, nous présenter leurs origines, leur enfance, leurs liens et les aventures qui ont jalonné leurs existences.
Le roman se divise en cinq grandes parties, comprenant plusieurs chapitres, qui marquent une étape différente dans la vie des personnages et qui nous permettront de mieux les découvrir et d’appréhender leur essence même. Chaque chapitre est consacré à une des femmes, la narratrice n’est jamais loin mais se fait discrète au point qu’on l’oublierait presque. Le mystère sera pourtant révélé par cette voix omniprésente, celle de la narratrice qui nous expliquera dans l’épilogue le fin mot de l’histoire : quel personnage est mort, quel autre a disparu du décor et dans quelles circonstances…Le lecteur avec délice fait connaissance avec ces trois femmes et plus on lit, plus on a envie de connaître la suite de leurs mésaventures. La narratrice avant de parler de leur histoire familiale, commence par un souvenir marquant partagé avec chacune.
Il y a Florence à l’enfance difficile avec une mère au foyer rencontrant de nombreux moments d’absence et qui ne sera pas sans séquelles pour la jeune fille plus tard. Ensuite, la narratrice nous fait découvrir Suzanne, personne très discrète, qui cherche toujours à se faire oublier, à se fondre dans la masse mais destinée à accomplir de grandes choses… Elevée par sa grand-mère, sa mère revient régulièrement d’Indochine où elle espère retrouver son amant. Enfin, nous découvrons Judith dont les parents juifs avaient, durant la seconde guerre mondiale, fui la répression antisémite à Varsovie et après un périple dangereux étaient arrivés en France avant d’émigrer en Argentine où Judith est née.
Critique :
Laure Adler maîtrise son roman de bout en bout avec une juste dose d’émotions, de péripéties, de mystère et de références culturelles et littéraires dans un style sans fioritures. C’est aussi toute une époque disparue qu’elle fait ressusciter, cette génération des années soixante, émancipée mais essuyant les plâtres de cette volonté de liberté à tout prix… Le destin de chacune est passionnant, les rebondissements multiples et le sentiment de bienveillance de la part de la narratrice est, bien qu’inscrit en filigrane, omniprésent et profond.
En résumé, la lecture est bouleversante, riche et très belle.
Si le lecteur se sent quelque peu désorienté entre ces trois personnages féminins au début, peu à peu, il sait les distinguer et ne veut plus les quitter. On dévore ce livre qui est un très bon roman de la rentrée littéraire 2013 davantage destiné à un public féminin.
L’extrait est l’incipit du roman qui, en quelques pages, résume bien son propos :
« C’était une nuit de pleine lune. Je me suis réveillée en nage. Dehors, le long des cyprès, j’ai cru entendre des bruits de pas. Je ne vois pas qui peut bien s’aventurer ici, dans cette maison isolée en pleine campagne, où je vis seule une partie de l’été.
Ma famille me reproche de vivre dans le passé, de ne plus savoir goûter au présent et de pouvoir encore moins imaginer l’avenir. Elle a raison. Je me suis construite une sorte de grande cage mentale où j’ai emprisonné des souvenirs, des émotions, des perceptions. Je vis avec mes disparues. Je leur parle parfois et cela ne me dérange pas. Contrairement à d’autres personnes de mon entourage, je n’ai pas de problème avec ce commerce. Elles ne me répondent pas, mais ce n’est pas grave. L’important est de savoir s’approcher de ce royaume où l’on ne s’aventure plus guère.
J’aime l’idée même de vieillir. Je l’ai acceptée avant l’âge et je le désire. Pourquoi est-ce la période de mes vingt ans qui revient indéfectiblement ? »
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