Nous sommes l’eau, Wally Lamb

Nous sommes l'eau, Wally LambNous sommes l’eau, Wally Lamb, Belfond, 21 Août 2014, traduit de l’américain par Laurence Videloup, 684 pages.

L’histoire en quelques mots :

Annie Oh, artiste très en vogue, mère de trois grands enfants, s’apprête à se remarier, cette fois, avec une femme : Viveca, celle grâce à qui, en partie, elle a été reconnue dans le milieu artistique. En effet, Viveca est galeriste new-yorkaise et a propulsé Annie vers la célébrité avant de conquérir son coeur. Depuis toujours, Annie cultive son art qu’elle nourrit d’objets hétéroclites récupérés sur la voirie, dans les déchetteries…
Pendant de nombreuses années, tandis qu’elle s’occupait de ses enfants tout en glanant quelques heures pour ses créations, elle est restée dans l’ombre se demandant quelle légitimité artistique elle pouvait revendiquer. Jusqu’au jour inespéré où un homme lui a décerné un prix alors qu’elle était sur le point de tout abandonner. A présent, elle a percé dans le milieu, ses revenus lui permettent un tout autre train de vie auquel, contrairement à sa compagne, elle n’est pas habituée et éprouve une certaine culpabilité. La culpabilité est d’ailleurs une thématique centrale de ce roman. Et pas seulement pour Annie…
Cette dernière est donc sur le point d’entamer, à cinquante ans, un nouveau chapitre de sa vie. A son mariage, ses trois enfants et son mari sont invités. Tous ne voient pas cette union d’un bon oeil. Annie le comprend mais le regrette également. Tout semble se bousculer dans son esprit : son passé lui revient avec violence et notamment ses secrets d’enfant qu’elle a été bien incapable de partager, avec qui que ce soit, pas même avec son mari…

Mon avis :

C’est toute l’histoire d’une famille et ses nombreuses ramifications autour de plusieurs événements décisifs et déterminants que Wally Lamb déroule ici. Il propose avec Nous sommes l’eau une véritable somme romanesque réservée aux grands lecteurs sans doute. La construction polyphonique permet une grande liberté : nous passons d’un personnage à un autre avec non pas une linéarité dans la progression des événements mais, au contraire, de nombreux retours en arrière et focus sur tel ou tel épisode clé. Le changement de personnage et donc de point de vue offre une belle diversité et une richesse à son lecteur. Peu à peu, sous nos yeux, se forme le puzzle familial alambiqué et empli de non-dits, de revirements et de révélations. Quelle maîtrise dans ce grand roman d’une écriture vive, tranchante, aux personnages d’un réalisme exacerbé ! L’alcoolisme, la violence et la pédophilie (le lecteur entrera même pour quelques chapitres dans l’esprit d’un pédophile non repenti) sont quelques-uns des thèmes abordés dans ce chef-d’oeuvre qui parle encore d’art, d’amour, d’homosexualité, de famille, de religion et de choix de vie.
Il devrait être sombre ce livre mais par je ne sais quel tour de force, Lamb parvient à en faire quelque chose, si ce n’est joyeux et léger, tout du moins lumineux, fort et indéniablement marquant.

Un extrait où nous partageons les pensées intimes d’Annie

   « La vérité en fait, Orion peut penser le contraire, c’est que je ne l’ai pas quitté pour Viveca, je l’ai quitté pour New York. Et toutes ces occasions d’y doper mon talent et mes ventes. L’évolution de la relation entre Viveca et moi n’a pas été planifiée, ni préméditée…
Ma « défection », voilà le terme qu’il a employé cet horrible dimanche dans le Connecticut où j’ai fini par reconnaître que VIveca et moi étions ensemble et que j’étais tombée amoureuse d’elle. « Judas », j’étais Judas. Et je pouvais me démerder pour aller à la gare car il n’allait pas se casser le cul à m’y reconduire. Fini la rigolade, il ne serait plus un tel connard. J’ai dû appeler un taxi pour m’emmener à New Haven et, pendant le retour à New York, je n’ai cessé de me repasser le film de notre dispute. Si j’étais Judas, il était Jésus-Christ, non ? Eh bien, qu’il descende de sa croix et accepte sa part de responsabilité dans l’échec de notre mariage. Qui a élevé Andrew et les filles toutes ces années quasiment seule quand il partait tôt et rentrait tard ? Dans son bureau toute la sainte journée jusque tard le soir à démêler les problèmes des étudiants ? Et
mes problèmes ? Le fait que toutes ces années je me sois sentie frustrée et négligée alors qu’il jouait le rôle du sauveur auprès de ses étudiants perturbés puis, de retour à la maison, se plaignait de leurs fardeaux ? Après avoir bu ses bières, il piquait du nez dès neuf heures mais moi, j’avais encore du linge à plier et à ranger, trois lunchbox à préparer pour le lendemain avant de pouvoir descendre à mon petit atelier sombre et grappiller une misérable heure ou deux pour mon travail. »

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  1. peyrot samya

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